Saturday, 12 April 2008

PHILANTHROPIE, QUAND TU NOUS TIENS !

On est prêt de monter aux barricades lorsque l’industrie du tabac, l’industrie pétrolière et même les géants de la malbouffe financent des fondations, des études, ou qu’ils tentent d’influencer les législateurs, mais il est très rare qu’on entend crier au scandale lorsque les richissimes pharmaceutiques financent des diverses causes dites sociales. Pourtant, dans le domaine du ‘’bénévolat’’ en santé, cette pratique est monnaie courante tel que l’article qui suit nous illustre.

La même industrie pharmaceutique qui envoie des médicaments périmés au tiers monde car cela coûte moins cher que de les détruire localement, qui se sert des enfants du tiers monde comme cobayes , qui n’investit pas ou peu dans la recherche des maladies ‘’peu rentables’’, qui invente des maladies après avoir inventé la pilule, pour ne nommer que quelques unes de ces tactiques pour s’enrichir davantage, tente de nous faire croire qu’elle ne s’attend à rien en retour des subventions qu’elle accorde aux diverses fondations et associations ?

Mais nos politiciens ‘’dorment au gaz’’ eux, ou du moins ils enterrent leur tête dans le sable pendant que les géants pharmaceutiques gouvernent le monde.
Heureusement qu’il reste encore quelques journalistes qui ne sont pas sous l’influence des potions envoûtantes de cette industrie et osent ainsi exprimer la vérité !


L’Association québécoise des allergies alimentaires, la Société Alzheimer du Canada, la Société de l’arthrite, la Fondation des maladies du cœur du Québec, le Conseil canadien de surveillance et d’accès aux traitements ainsi que la Fondation des maladies de l’œil ont un point commun : comme de nombreux groupements du milieu de la santé, ils sont financés par des entreprises privées, dont des compagnies pharmaceutiques.

Linda Furlini a été présidente de la Fédération québécoise des sociétés Alzheimer et membre de la Société Alzheimer du Canada. En entrevue avec Le Soleil, elle explique avoir quitté le navire par dépit : «Des fois, on met beaucoup trop d’emphase sur les médications.

«Il y a beaucoup d’influences, assure-t-elle. Des gens liés aux compagnies s’impliquent dans la Société.» Mme Furlini aurait préféré que le mouvement réclame plus de soutien à domicile, plus de ressources pour les aidants naturels, ceux qui prennent soin des malades. Des conjoints, conjointes, parfois âgés, souffrant souvent de symptômes dépressifs, selon elle. «Alors, on leur donne des pilules aussi?»

Jointe à l’Université McGill, où elle poursuit ses études doctorales, Linda Furlini vante le dévouement des personnes impliquées au «niveau local». Elle est toutefois toujours agacée par un arrière-goût à la suite de son passage, à la fin des années 90, «aux niveaux provincial et fédéral».

Le chef des communications et du développement de la Société Alzheimer, Graeme Page, confirme sans ambages que des pharmaceutiques subventionnent l’organisation. Les Pfizer, Novartis, Janssen-Ortho et Lundbeck financent des activités locales, provinciales et nationales. En plus des dons, elles fournissent du matériel éducatif.

Jamais, garantit-il, ces entreprises n’ont demandé de faire la promotion de quelque produit. La Société dépense les fonds à sa guise; une politique interne le spécifie. On remercie néanmoins publiquement les entreprises pharmaceutiques, comme les autres donateurs.

«Ils sont totalement indépendants», acquiesce une des membres de l’équipe des communications chez Pfizer Canada, Sylvie Tessier. La multinationale du médicament épaule ces «partenaires» du milieu de la santé afin de favoriser la diffusion de l’information, dit-elle. Ainsi, la population pourra «faire des choix éclairés en matière de santé». L’entreprise soutient, en outre, la recherche.

«Indépendantes»

Pfizer n’espère aucun retour d’ascenseur, continue Mme Tessier. Les politiques sur les dons corporatifs adoptées par les associations, sociétés et instituts l’interdisent : «Nos contributions sont tout à fait indépendantes.»

Difficile d’évaluer l’apport des compagnies pharmaceutiques. La plupart des sources contactées ne se sont pas mouillées.

Au Conseil canadien de surveillance et d’accès aux traitements (CCSAT), la dirigeante, Louise Binder, fait valoir que plus de la moitié de ses revenus sont versés par le gouvernement fédéral.
Elle convient également que plus de 40 % proviennent des Bristol-Myers Squibb, Abbott, GlaxoSmithKline, Merck Frosst et autres Pfizer. «C’est la seule source de financement qu’on peut avoir.»

Le CCSAT fait pression sur le gouvernement pour que les traitements contre le VIH-sida soient homologués plus rapidement. «Nous utilisons l’argent comme bon nous semble. Ma position est toujours prise dans l’intérêt des patients.»
Mme Binder compose avec le VIH. Comme les autres malades, elle mise gros sur les nouvelles molécules. «(Les compagnies) savent que sur certains sujets, leurs intérêts et les nôtres sont les mêmes. (...) Est-ce que je devrais mourir parce que ça donne de l’argent aux compagnies?»
Sans condition
«On n’a pas le choix parce qu’on n’a pas de subvention, affirme à son tour la directrice générale de la Fondation des maladies de l’œil, Hélène Tremblay. Alors, on prend les gens qui veulent bien nous donner de l’argent, mais sans condition.»

Entre autres, Allergan et Pfizer soutiennent les activités de la Fondation. «On n’a pas de problème avec ça! (...) L’œil fait partie de leur mission.»
«C’est clair que ça prend les “partenaires“, sinon on ferme nos portes.» Le directeur général de la Société de l’arthrite en remet. En six ans au sein de la Société, Andy Chabot ne s’est «jamais senti les mains liées». Ici, les Laboratoires Abbott, Merck Frosst, Pfizer, Novartis, Bristol-Myers Squibb et bien d’autres participent au financement.
À la Fondation des maladies du cœur, Pfizer côtoie un fabricant de margarine et une chaîne de magasins. «En aucun temps une compagnie pharmaceutique ou une autre entreprise privée (...) ne va vraiment influencer», plaide le directeur marketing et communications, Serge Breton. «En aucun temps on ne fait de recommandation de produits de nos commanditaires.»
L’Association québécoise des allergies alimentaires ne nous a pas rappelés. EpiPen, Paladin et les producteurs d’arachides sont au nombre des commanditaires affichés dans leur site Internet.

«Les cadeaux viennent avec des attentes»

«C’est un grand problème. (...) La majorité (des grandes associations de patients) ont du financement de l’industrie pharmaceutique.»Selon Barbara Mintzes, professeure associée au département d’anesthésiologie, de pharmacologie et de thérapeutique de l’Université de la Colombie-Britannique, le conflit d’intérêts est flagrant : les groupements sont subventionnés par des entreprises vendant des produits à leurs membres.

«Peut-être que c’est plus difficile pour eux de critiquer les compagnies qui les commanditent. (...) Il faut regarder quel est le rôle des associations de patients et si elles peuvent l’assumer.»
Mais elles ne sont pas les seules à piger dans la cagnotte offerte par les entreprises pharmaceutiques.

Des associations de médecins se servent, note Barbara Mintzes. Le matériel éducatif qu’elles distribuent serait parfois rédigé et imprimé par les compagnies.
Et les formations pour les médecins sont souvent payées et concoctées par les pharmaceutiques, fait remarquer Mme Mintzes, qui nous appelait du centre de Vancouver. Elle y participait à un congrès de médecins entièrement autofinancé, explique-t-elle. Il faut payer l’accès et c’est moins luxueux...

La coordonnatrice d’Action pour la protection de la santé des femmes, Anne Rochon Ford, est tout aussi critique : «Sans qu’ils s’en aperçoivent, les gens deviennent endettés envers les compagnies. (...) Les cadeaux viennent avec des attentes.»

«On peut penser que c’est juste de la bonne volonté, admet-elle, depuis Toronto. Mais il y a toujours des motivations.»

Mme Rochon Ford convient que les diverses associations se sont dotées de politiques sur les dons. «Ça paraît bien sur papier. (Mais) ça donne aux compagnies pharmaceutiques la liberté de laisser l’impression qu’elles sont très généreuses, qu’elles donnent de l’argent sans restriction. Sur le dos de ces organisations, ça améliore leur image publique.»

Les membres des associations sont sûrement de bonne foi, au dire d’Anne Rochon Ford. «Mais le lien avec les compagnies pharmaceutiques rend les choses moins nettes. (...) Est-ce qu’ils peuvent parler ouvertement quand ils comptent sur l’argent des compagnies pharmaceutiques?»

La solution? Que les groupes se contentent de moins d’argent ou que l’État réinjecte les fonds qu’il leur a enlevés, répondent Barbara Mintzes et Anne Rochon Ford.

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